CHAMBRE NOIRE.
Découvert par hasard ce fonds de 150 plaques de verre au gélatinobromure d’argent issues d’un atelier photographique en Alsace entre 1900 et 1945.
Poussez la porte, au petit matin, de cet atelier photographique alsacien, installé dans une des rues ou ruelles de la région, comme il y a 100 ans… Montez l’escalier en colimaçon de cet immeuble sombre, jusqu’au palier partagé et entrez délicatement sur la pointe des pieds, pour ne pas déranger la séance en cours. Partez à la rencontre de ces individus, sans doute disparus aujourd’hui, aux regards profonds, aux attitudes particulières, figés par la prise de vue et le temps de pose, face au photographe portraitiste et sa chambre photographique sur pied. Prenez la place, le temps d’un instant, de celui qui immortalisa ces moments, ces vies, ces histoires entre 1880 et 1945 dans une Alsace partagée, chahutée, bouleversée…
Qui voyez-vous ? Qu’entendez-vous ?
Il faut imaginer, si vous n’êtes pas coutumier du fait, ce que procure comme émotions, « la trouvaille ». Frissons d’un moment intime. Plonger, la main fébrile, dans le passé et en tirer, telle une partie de poker, une après l’autre, une tranche de vie, carte gagnante ou perdante, de votre jeu de collection.
L’objet inerte, passé, abimé, vous ouvre la porte, vous happe littéralement vers l’histoire qui l’a vu naître. Une porte temporelle qui vous ramène, en un court instant, « là » dans l’histoire, grande ou petite, des sons et des croyances, ancrées profondément en vous, mais que vous n’avez pas eu l’impression de vivre à titre personnel. Les joies et les peines de l’humanité.
« Au début du XXe siècle on assiste, en liaison avec les évolutions techniques et sociales de la photographie, au développement de nombreux ateliers photographiques en Europe, […] lieu de réalisation et de production des images, l’atelier du photographe évolue avec le temps et intègre des modifications techniques qui doivent répondre à la demande d’une clientèle spécifique. »
« Les accessoires sont ici ceux utilisés dans les ateliers traditionnels. D’abord, en regard avec le passé : guéridons, consoles, colonnes, peaux de mouton pour faire poser les bébés nus, fleurs, mobilier bourgeois… » Anne Cartier-Bresson Catalogue exposition « Studio Zgorecki » Jeu de Paume / Filigranes Editions – 2020
Que s’est-il vraiment passé dans cet atelier à la chambre noire ? Un atelier, qui aurait pu rester inconnu. Il y en avait beaucoup en Alsace au début du XXe siècle, presque un à chaque coin de rue. Des bons ou des moins bons, pouvait-on dire. Vous n’aviez que l’embarras du choix pour vous faire « tirer le portrait ».
L’atelier photographique est encore à cette époque, le passage obligé pour un grand nombre de personnes, afin d’avoir «une image» à sauvegarder, des temps forts d’une vie. La naissance, le mariage, la communion, le métier, les spectacles, la vie militaire, le temps qui passe et parfois la mort. Mais en Alsace, l’histoire de la photographie reste entre 1870 et 1945, très marquée par les différents évènements qui ont fait sa mutation et sa particularité de région partagée. C’est peut-être aussi ce qui rend, à chaque fois, à chaque découverte d’un fonds, l’effet de surprise et d’émotion encore plus intense et plus fort.
Reste à nous, aujourd’hui, d’imaginer ou d’écrire, ce que tous ces personnages ont pu vivre, une fois l’image dans la boite et la porte de l’atelier refermée…
Voir > l’article de Joffray Vasseur pour France3 Alsace
Voir > l’article de Camille Gagne Chabrol pour le CUEJ info
Voir > le reportage de Zut Magazine Entretien avec Alain Berizzi à l’occasion de la superbe exposition « Chambre noire | La vie dans un atelier photographique en Alsace (1880-1945) à La Trezorerie jusqu’au 31 mars.
Vous pouvez vous procurer la catalogue de l’exposition en vous rendant sur notre page boutique ici !








